Qu'est-ce qui rend le travail au sein du projet Béninclusif spécial pour vous ?
CR : La nature même du projet Béninclusif le rend atypique, notamment dans la sous-région qui reste encore marquée par la mise en œuvre plutôt classique des projets de développement. C’est l’un des premiers projets ayant développé une approche de marchés inclusifs au Bénin, ce qui reste un véritable défi pour l’équipe projet.
Beaucoup d’échanges et de sensibilisation ont été réalisés sur l’approche développée auprès des différents partenaires (publics et privés) depuis le démarrage. Cela, à mon sens, a permis d’ identifier des acteurs engagés et d’établir des partenariats de qualité. Il est très intéressant de voir ces acteurs évoluer de leurs côtés, développer leurs propres réseaux et ainsi créer de nouvelles dynamiques. Observer ces nouvelles dynamiques et apprécier les potentialités multiples qui en découlent rendent le travail au sein du projet très intéressant.
Je suis ravie de travailler avec une équipe aussi engagée, qui a su nouer des relations solides avec les partenaires, ce qui représente une véritable force dans la mise en œuvre des activités. L’équipe a relevé de nombreux défis, notamment avec certains partenaires publics qui n’étaient pas familiarisés avec l’approche mise en œuvre par le projet. Depuis mon arrivée, j’ai pu constater que les membres de l’équipe continuent de rappeler la spécificité du projet ainsi que la logique sous-entendue par ce dernier, et cela semble porter ses fruits.
Quels sont les défis spécifiques auxquels vous êtes confrontés avec Béninclusif ?
CR : Il est parfois encore difficile de se positionner entre les besoins immédiats exprimés par les partenaires sur le terrain (majoritairement des besoins en équipements et en financement), et une vision du projet qui s’inscrit plutôt sur le long terme. Trouver un juste milieu n’est pas toujours évident et cela reste un travail quotidien pour l’équipe projet qui doit parfois amener certains acteurs à opérer des concessions.
Dans l’optique de l’atteinte des résultats, les deux années à venir sont capitales : les deux premières années ont vu émerger de premières expériences pilotes soutenues par le projet. Il s’agira maintenant de s’appuyer sur les résultats concrets obtenus pour étendre ces expériences, aussi bien qualitativement que quantitativement (on peut citer ici la production de larves de mouches soldat noire pour réduire le coût des aliments pour poissons, l’élaboration de formules scientifiques permettant d’améliorer la qualité de ces aliments, ou la mise en place de clusters pour favoriser l’accès au marché) . La mise à l’échelle reste donc un défi majeur pour les deux dernières années de mise en œuvre du projet.
Enfin, l’intensification et l’amélioration de la qualité de la production sont souvent très liées à l’accès aux financements pour les producteurs et les transformateurs. Le projet doit intensifier son action et son rôle sur ce volet durant les deux ans à venir, à travers notamment les partenaires privés du projet qui appuient l’élaboration de plans d’affaires solides et la structuration des clusters avant la soumission auprès des institutions de finance.
À votre avis, à quoi ressemblera l'avenir de la coopération au développement en Afrique occidentale ?
CR : Le secteur du développement, notamment en Afrique de l’Ouest reste encore très marqué par des projets qui répondent à des besoins et à l’obtention de résultats sur le court terme et qui ont encore du mal à s’inscrire dans une logique pérenne ; dû à des contextes fragiles et complexes.
Le changement de paradigme s’étale dans le temps et reste confronté à de nombreuses réticences sur le terrain. Je reste cependant convaincue que des changements dans la nature même des projets seront opérés dans les années à venir, des approches holistiques me semblent plus adaptées aux réalités du terrain.
Si l’on considère que les fonds alloués à l’aide au développement ont vocation à diminuer dans les années à venir, il me semble indispensable de revoir l’approche développée à travers les projets. Il faudra s’inscrire dans des logiques plus durables où les acteurs du pays (publics et privés) pourront être en mesure de prendre le relai et d’impulser eux-mêmes ces dynamiques de changement.
De plus amples informations sur les réalisations du projet sont disponibles sur le site web du projet, y compris la possibilité de s'inscrire au "Bulletin Béninclusif".