Comme beaucoup de jeunes Congolais vivant dans des contextes fragiles, Alfred a vu ses rêves se détériorer faces aux réalités du quotidien. À seulement 14 ans, il se rend à l’école avec une petite tondeuse manuelle, gagnant quelques pièces en coupant les cheveux de ses camarades. Mais les obstacles sont nombreux : la maladie, le manque de ressources le forcent à quitter l’école.
En 2018, il tente d’intégrer un salon de coiffure. En vain. « Je n’avais pas la touche convaincante », confie-t-il. Puis un jour, il découvre la tondeuse électrique, un instrument qui a fait naître en lui une véritable passion pour la coiffure. Mais la passion seule ne suffit pas. Il faut des compétences, une méthode, un vrai tremplin.
Ce tremplin arrive en 2023, lorsque Alfred est orienté vers le programme PROMOST IV. Il y découvre non seulement une formation technique en coiffure mixte, mais aussi des modules essentiels sur le développement personnel, la gestion des conflits, la santé reproductive, l’entrepreneuriat et l’éducation financière. Bien au-delà des gestes du métier, ces modules essentiels lui enseignent à gérer une clientèle, planifier ses projets, prendre des décisions stratégiques et faire face avec résilience aux aléas de la vie.
Pendant 3 mois de formation technique et 6 mois d’accompagnement, Alfred s’investie totalement dans l’acquisition des compétences avec une vision bien définie dans le métier de coiffure mixte.
Dès février 2024, Alfred ouvre son propre salon de coiffure. Avec un prêt initial de son entourage, il achète trois tondeuses, des miroirs, des peignes, des produits de soin et loue un petit local. Le salon « Don Béni » est né. Aujourd’hui, douze mois plus tard, il génère en moyenne 15 000 francs congolais (environ 4,3 CHF) par jour, soit près de 100 000 francs (environ 28,5 CHF) par semaine, lui permettant de subvenir aux besoins de sa famille. Mais son succès ne s’arrête pas à l’argent.
Alfred est passé de vivre chez son père à posséder sa propre maison de trois chambres avec salon, un abri qu'il a bâti de ses mains. Ses revenus lui permettent de couvrir le loyer de son salon, l'électricité, la nourriture pour sa famille et ses frais de transport.
Il épargne chaque semaine dans trois associations villageoises d'épargne (AVEC) et a investi dans l'élevage de chèvres et de volailles, garantissant à sa famille une sécurité supplémentaire. Il ne s’arrête pas là : il forme désormais d’autres jeunes, transmettant son savoir et sa passion.
Alfred voit son avenir grand. Il souhaite aider sa femme à reprendre ses études pour obtenir son diplôme d’état, ouvrir d’autres salons dans les villages voisins, scolariser ses enfants et agrandir sa maison. Son ambition est aussi communautaire : il veut devenir un acteur de changement, un exemple pour la jeunesse d’Idjwi.
Dans un pays où plus de 32 % des jeunes de 15 à 24 ans ne sont ni en emploi, ni en études, ni en formation (source : banque mondiale, 2021), des histoires comme celle d’Alfred montrent que des solutions existent. A condition qu’elles soient localement ancrées, humainement pensées et structurellement durables. PROMOST IV n’offre pas seulement une formation professionnelle. Il construit des ponts vers l’autonomie, renforce les systèmes locaux et redonne aux jeunes les moyens de croire en eux.